Jamais période n’aura été aussi sombre. Ne soyez donc pas surpris de mon isolement passé : le rhapsode que je suis, marqué par une ère que l'humanité aura du mal à oublier, a décidé d’arrêter un temps de vagabonder pour réserver sa rime à quelques frênes solognotes.
Isolé je fus mais pas confiné ; se ressourçant dans le froid boisé d’une bourgade conviviale. Seul mais accompagné ; d’un couineur Black Metal aux accents canins et au patronyme bohémien. Il m’aura bien fallu tous ces artéfacts pour survivre au spectacle affligeant proposé par les autres emplumés de cette volière qui me sert de monde. Et quel monde ils en ont fait.
Un monde coupé en deux. Reléguant la faille de San Andreas au rang de sillon inter-fessier.
D’un côté les complotistes : persuadés que le virus a été fomenté par une organisation secrète aux desseins hégémoniques servant les intérêts des groupes pharmaceutiques, ils s’opposent aux autres, volontaires et disciplinés, cherchant à participer à la seule option qu’on leur propose : celle de l’unité comportementale pour éradiquer l’ennemi viral.
D’un côté ceux qui sont contre le vaccin. Et donc forcément contre le pass-sanitaire (vu qu’ils ne se feront pas vacciner, suivez merde). Soit parce qu’ils sont dubitatifs quant à la réalité du vaccin, représentant ainsi un sous mouvement épique au sein des complotistes sus mentionnés, soit parce qu’ils crient à l’atteinte à la liberté, philosophant sur le fait qu’être libre c’est être contre. De l’autre ceux qui se vaccinent. On y trouve des complotistes qui seraient pour le pass-sanitaire, des plus de 50 ans qui ont vus des potes mourir, des jeunes en bonne santé mais alcooliques et qui ne veulent pas rater l’ouverture des bars, des complotistes négationnistes travaillant chez Pasteur ou Sanofi, des gens contre le pass-sanitaire mais alcooliques donc qui ont oublié qu’ils étaient contre, et des volontaires disciplinés qui continuent de l’être.
D’un côté les pro Marcon, parce qu’il aura tenu bon la barre dans la tempête. On y trouve peu de complotistes, peu de négationnistes, mais en revanche on y trouve des jeunes vaccinés, content qu’on leur donne le bac gratos et des vieux contents que des places se soient libérées pas chères dans les EHPAD. De l’autre les anti Macron, qui lui reprochent d’avoir enfermé un pays dans un élan dictatorial et liberticide. On y trouve certains qui étaient déjà contre lui avant la pandémie, d’autres qui le sont devenus, des qui ont voté pour un autre, des qui ont pas voté du tout, et quelques jeunes non complotistes, pour le pass-sanitaire, mais dégoutés que le BAC soit donné à tous ces fainéants qui n’ont pas eu 18 de moyenne comme eux.
D’un côté ceux qui gueulent parce qu’il n’y avait pas assez de masques au début. Et ceux qui pensent que c’est la faute de personne, on était tous dans le même bateau.
Et puis on a eu aussi d’un côté ceux qui refusent de porter les masques parce que c’est liberticide. On y trouve certains qui gueulaient déjà parce qu’il n’y en avait pas assez, mais qui sont complotistes, et donc de toute façon pour eux les masques servent à rien parce que le virus est factice. De l’autre ceux qui les ont portés, certains sont des complotistes anti macron qui voulaient pas payer l’amende et certains sont juste des disciplinés qui continuaient de l'être.
Oui la période fût sombre. Jamais nous ne fûmes tant divisés, coupés en deux, et encore en deux, et encore en deux… Jusqu’à en devenir d'abscons confettis confinés.
Mais nous savons aujourd’hui qui peut nous sauver. Il faut qu’elle prenne le pouvoir, qu'elle monte au front, celle qui rassemblera la nation. Jamais elle n’aura été autant attendue, jamais elle n’aura eu autant de sens. Et il n’y avait qu’elle pour me sortir du bois.
Elle ? La musique.
La seule et unique chose non-essentielle à être vitale et virale, pandémique et bénéfique.
En particulier celle des Electric Beans, qui fêtera ses 10 ans le 21 juin prochain.
Heckle Freux - Survivor
